RYTHMES
C'est une chose que les personnes vivant à la campagne connaissent encore bien: il y a le rythme du jour et de la nuit; le rythme des saisons; le rythme quotidien des bêtes à nourrir; le rythme des croisances, des moissons, des fruits murs...
Il y a des rythmes plus artificiels: celui des journées : "Métro, boulot, dodo..." Rythmes des vacances d'été, et maintenant d'hiver avec les embouteillages sur les routes.. Rythme des évènements annuels: Roland Garros ou Tour de France...
Il y a les rythmes de la vie: enfance, age adulte, age mûr...
Ces rythmes sont à la fois naturels: il y a les couche tôt et les lève tard....et artificiels, appris dans une civilisation donnée: comparer le silence des nuits dans les grandes villes du nord, et l'agitation tumultueuse et bruyante des nuits des villes du midi dans la chaleur de l'été.
DUREE
Difficile à définir. N'est qu'un objet d'expérience personnelle.
Le temps, c'est long ou c'est court. Cela peut paraître interminable lorsque l'on attend dans l'angoisse. (Cf parents qui attendent un signe après l'enlèvement d'un enfant) Le temps est toujours long lorsque l'on souffre. (Cf. ce "goutte à goutte des minutes")
Celui qui n'a jamais eu d'insomnies ne sait pas ce que représente une nuit sa
ns sommeil, et la longueur du temps. Celui qui n'a jamais été un peu dépressif non plus...
PROJETS
C'est le fait d'avoir des projets, des désirs qui donne au temps un sens, une tension.
Le projet joue le rôle du voltage dans une lampe. S'il n'y a pas de voltage, il n'y a pas de courant. Si l'on met du 110 volts dans une lampe faite pour le 220, elle ne donne qu'une faible lumière. Si l'on met du 220 dans une lampe faite pour le 110, elle éclate.
Ainsi va la vie. Elle doit être sous tension. Trop peu de projets laisse une vie inerte et sans souffle. Trop de projets peut écarteler et disperser. Comment ne jamais manquer du bon compte de projets? Et ceci à tous les âges de la vie.
Mais comment donc avons-nous appris le temps?
C'est une longue histoire dans laquelle chaque étape compte, et nous sommes en route, bien des découvertes sont encore devant nous.
Il y a l'étape du bébé: lorsque la faim le prend, il se met à attendre à la fois son biberon, et celle qui le lui donnera. Et il a autant faim de lait que de l'amour de celle qui le lui apporte. C'est ainsi que s'apprend le temps: dans l'expérience de la tension entre un besoin et un désir.
Des expériences ont été tentées qui montrent que des bébés mal alimentés mais bien dorlotés parce qu'aimés, se portent mieux que des bébés bien alimentés mais peu dorlotés. La première expérience du temps elle se fait ici. Elle sera satisfaisante si le biberon et la maman arrivent à point nommé. Elle pourra être lourde d'angoisse si le biberon ne venant pas à temps, la peur d'être abandonné vient s'installer au cour de cette attente et la rendre douloureuse.
Vient l'étape de l'école: celle où l'enfant doit apprendre à entrer dans le temps des autres. Etape qui va rogner les envies ou les désirs pour imposer un rythme collectif dans lequel beaucoup de l'originalité de chaque enfant va s'engloutir. Cf. difficultés pour l'enfant comme pour la mère de la première journée d'école.
Plus tard viendra le temps du travail. Il introduira un nouveau rythme, marqué par la régularité, la sanction des retards, les levers tôt et les couchers tard, .masqué parfois par le sentiment d'être libre, l'argent donnant l'indépendance, alors qu'en fait il programme, en dehors de nous, près de 90% de notre temps disponible.

Vient un jour le temps de la retraite. Il est vécu de façon bien différente selon les personnes, les circonstances. Autre est l'entrée en retraite de celui qui a préparé son départ de longue date, et celui qui apprend sa mise en retraite anticipée au détour d'une mesure de regroupement d'entreprise, ou de "dégraissage" de personnel.. Cf. expériences de cadres licenciés.
Mais le scénario est essentiellement le même.
La société nous livre un double message:
- Tu as, pendant de longues années, donné tout ton temps disponible à la société. Aujourd'hui la société te remet tout ton temps. Désormais tu es libre d'en faire ce que tu veux. Chaque minute désormais t'appartient. Il tient à toi d'en faire ce que tu veux.
- Sache seulement que maintenant, moi société, je n'ai plus besoin de toi. La vie active à partir de maintenant passera en dehors de toi. Tu es socialement un "inactif"
Ce message est redoutable. Quelques-uns retrouveront rapidement un nouvel équilibre. D'autres mettront des mois ,voire des années à rechercher, plus ou moins bien, comment se situer dans ce temps nouveau.
Trois façons de se situer dans le temps
Dès les premiers mois de notre vie, nous avons pris des habitudes, des façons personnelles de réagir par rapport au temps. On peut tenter de les rassembler en trois grands styles de comportements:
Il y a les TEMPORO-ADAPTES. Ce sont ceux qui dès le départ ont vécu une bonne relation entre leurs désirs et la satisfaction. L'attente du biberon n'a pas été trop longue. Elle leur a donné un sentiment de confiance dans le temps qui leur permet de vivre l'aujourd'hui paisiblement. Ils sont capables de s'adapter aux imprévus de la vie. Ils ne redoutent pas le futur, mais le voient plutôt comme une chance qui leur est offerte.
Ils s'y engagent paisiblement.

Il y a les TEMPORO-ANGOISSES. Il s'est passé chez eux quelque chose qui a troublé le déroulement normal de la vie entre le besoin, le désir et la satisfaction. Ils vivent alors avec l'inquiétude d'un temps qui pourrait leur manquer, ne pas leur apporter ce qu'ils attendent. Il leur faut donc contrôler le temps. Il faut le dompter. Il faut avoir prise sur lui.Il faut le dominer.
Ce sont toutes les personnes qui vivent dans un désordre extérieur, manifestant leur désordre intérieur. Elles n'arrivent pas à maîtriser leur espace de vie comme elles ne maîtrisent pas leur espace de temps, et elles vivent cela dans l'inquiétude.
Ce sont celles aussi qui, au contraire, s'acharnent à mettre de l'ordre partout, dans leur maison, dans leur vie, dans leur emploi du temps hyper-organisé. Ce sont les obsessionnels de l'ordre et de l'exactitude. Toute cette organisation stricte laisse apparaître une sorte de peur devant l'imprévu. Ces personnes sont très utiles dans la vie sociale, parce qu'elles sont ponctuelles, organisées, scrupuleuses. Elles ne rendent pas toujours la vie facile à leur entourage familial ou à leurs collègues de travail.(Un bon critère pour se repérer: comment vivons-nous les préparations à partir en voyage?)
Il y a enfin les TEMPORO-ALLERGIQUES. Ceux-la ont sans doute assez bien vécu les premiers mois de leur relation au temps, mais en grandissant, n'ont pas réussi à se mouler dans le temps social dans lequel on a voulu les introduire. Ce sont d'incorrigibles retardataires, qui ne se plaisent que dans l'improvisation. Ils ont des agendas, mais oublient de les regarder. Ils ne tiennent jamais longtemps à la même place, sauf s'ils trouvent l'endroit qui leur plait. Ils ne préparent jamais un projet longtemps à l'avance, mais sont les rois de l'improvisation. Ce sont souvent d'excellents animateurs de groupe à cause de leurs qualités d'improvisation.
On trouverait probablement dans cette catégorie, beaucoup d'enfants en échec scolaire. Ils ne sont pas inintelligents. Mais leur rythme personnel ne s'adapte pas à celui que, de façon de plus en plus stricte, la vie sociale nous impose.
Dans beaucoup de difficultés de jeunes à entrer dans le travail, dans les fuites vers la drogue, le tabac, ou l'alcool, il y a probablement assez souvent comme des réactions allergiques à l'entrée dans le temps cloisonné proposé, sans échappatoire possible, à la plupart de nos vies.
Sans doute n'y a-t-il pas de personne qui soit strictement d'une seule catégorie. Nous sommes tous un peu adaptés, un peu angoissés, un peu allergiques. Cela dépend des moments, des situations. Mais il y a des pentes plus habituelles de notre caractère dont il nous faut tenir compte.
Essayons donc de comprendre maintenant comment, avec notre style propre, notre structure personnelle de temps nous allons aborder les changements de rythme, de durée, de projets que nous propose le temps de la retraite.
2°) VIVRE LE TEMPS DE LA RETRAITE

Nous voilà donc seuls, à l'entrée en retraite, avec une véritable tornade dans l'organisation de notre temps. Avec une double caractéristique:
Tout est bouleversé: non seulement l'organisation même de notre temps, mais les appuis habituels : professions, déplacements ne peuvent plus masquer le problème. Tout ce qui mettait notre temps à la fois en mouvement et en ordre est bousculé.
Nous sommes plus seuls que jamais pour affronter ce bouleversement: chacun dans le couple doit résoudre ce problème pour lui-même.
Il nous faut:
- Trouver notre rythme
- Découvrir la durée
- Créer nos projets
TROUVER NOS RYTHMES
· La majorité des rythmes appuyés sur le travail disparaissent:
- Rythme du lever: faut-il mettre son réveil?
- Rythme du coucher: était commandé par l'obligation de se lever pour le travail.
- Rythme des vacances: absurdité de parler de la retraite comme d'un temps de vacances. Le propre des vacances est d'être limité dans le temps. Beaucoup vers la fin des vacances aspirent à la rentrée.
- La vie sexuelle elle-même était souvent marquée par le rythme de la semaine. La nécessité de se lever tôt le matin restreignait certaines ardeurs du soir.
- Chacun, seul, en couple, en famille à l'entrée en retraite est appelé à retrouver des rythmes personnels à sa journée, à sa semaine, à ses années.
- Au départ double sentiment:
- Sentiment de flottement, avec parfois légère inquiétude, appréhension.
- Sentiment de liberté, de respiration, avec parfois une overdose de liberté qui peut affoler ou paralyser.
- Deux caractéristiques de ce travail pour retrouver nos rythmes:
C'est un travail personnel:
ce sont mes choix, mes goûts, mes désirs qui petit à petit vont me permettre de construire ces ryt
hmes nouveaux. Avoir le temps de s'écouter est le privilège offert à cette étape de la vie, mais on n'y a été que peu habitué pendant les années de travail. On n'aime pas "s'écouter". Sentiment de paresse, de sensiblerie, de faiblesse. Or, il faut que je le sache, personne maintenant ne m'imposera de rythme que je n'aie d'abord accepté . Jamais je n'ai eu autant l'occasion d'être moi-même, sans contrainte. En ce sens la retraite est vraiment le temps de la liberté. Et personne ne peut faire à ma place ce travail de reconstruction
C'est un travail qui concerne tous les aspects de ma vie :
rien n'échappe à cette nécessité de trouver un rythme nouveau:
- Mon corps: sommeil, nourriture, activité sportive, respiration...
- Mon cour: le temps des petits enfants, mais aussi des amis, de nouvelles amitiés, temps de la rencontre gratuite.
- Mon intelligence: quelles sont mes curiosités, mes soifs de connaître ou d'apprendre? Comment s'organiser pour entretenir jusqu'au terme de la vie notre capacité de connaître et de comprendre?
- Ma relation avec la société: mon lien antérieur était presque toujours construit sur le travail. Il y a maintenant une rupture. Comment vais-je retrouver une place au sein d'un ou plusieurs groupes, qui rythme mes journées, mes semaines, mes mois, me donner un sentiment d'utilité sociale?
Importance de réfléchir sur le comment nous nous y prenons pour retrouver nos rythmes personnels, parce que au cours des années qui viennent plusieurs occasions viendront qui risqueront de faire appel à cette capacité de nous adapter à des situations nouvelles: ce sera souvent à l'occasion de moments difficiles de la vie:
- - La maladie, qui bouleverse temporairement ou définitivement le bel équilibre que nous avions réussi à construire.
- - Un départ, un deuil qui nous laisse plus seuls et livrés à nous-mêmes. Ce n'est pas toujours facile d'accepter le départ des enfants qui laisse notre maison comme un grand bocal vide.
- - Une obligation de déménagement qui nous oblige à reconstruire complètement notre existence, dans un cadre totalement nouveau.
Le secret de la réussite de notre nouveau temps réside beaucoup dans cette capacité de nous adapter à des situations nouvelles. L'ADAPTABILITE, capacité de changer nos habitudes à un moment ou nous voudrions nous asseoir toujours dans le même fauteuil! Condition de la réussite de l'âge.

DECOUVRIR LA DUREE
On a peu l'occasion de s'apercevoir de la durée du temps. En général les gens se plaignent de courrir après le temps. Le temps parait alors très court.
- La durée ne nous arrive qu'à l'occasion de chocs, de ruptures de rythmes, qui sont la plupart du temps douloureux:
- La souffrance: une rage de dent, une maladie...On dit:"long comme un jour sans pain"
- Une longue attente: celle de celui qui attend les nouvelles dans une salle d'attente après une opération risquée de celui qu'il aime....
- Les insomnies...
La durée arrive parfois aux retraités, lorsqu'ils n'ont pas encore trouvé leurs nouveaux rythmes, ou lorsqu'ils entrent dans une période un peu dépressive:
Le mari qui passe sa journée complètement seul tandis que sa femme continue à travailler.
La femme seule, qui se lève le matin en se demandant à qui elle pourrait bien avoir l'occasion de parler dans la journée. Cf. : "Durant ces trois jours je ne dirai qu'un mot: le merci à mon boulanger qui me donnera ma baguette de pain! C'est un peu court!".
Cf. : Cet homme de 80 ans, qui m'explique le sens de ce que les autres autours appellent sa détérioration: "Je perds des choses...mais, un objet qu'on perd, c'est un objet qu'on cherche... un objet qu'on cherche.... cela fait toujours un peu de temps occupé."
Celui qui éprouve le poids de la durée se sent souvent un peu seul et étranger dans un monde ou chacun se plaint de ne pas avoir le temps. Et pourtant cette expérience est très riche.
Etrangement, en nous faisant prendre conscience de la longueur du temps, elle nous introduit à une réalité profonde que chacun cherche plus ou moins à fuir, à savoir que la durée de notre temps est limitée. C'est peut-être à cause de cette porte entr'ouverte sur les limites de la durée de notre vie, que cette expérience est peu partagée. On n'aime pas beaucoup parler de sa mort.

Pourtant, accepter d'avoir l'âge qu'on a, accepter qu'au terme de cet âge il y a la mort comme terme de notre parcours de la vie, est la condition d'un bon vécu de la durée.
Savoir que l'on n'a aucune prise sur le sentiment de la durée. Le seul lieu où l'on peut agir, c'est en retrouvant nos rythmes, ou en réinventant des projets.
CREER NOS PROJETS
- Sans que nous y prenions garde, la plupart du temps, notre vie est constamment tissée de projets, petits ou grands, à court terme ou à long terme, dont nous poursuivons la réalisation. Ce sont ces projets qui donnent un sens à notre temps, sa tension, qui le rythment et nous donnent le sentiment d'une durée bien remplie.
- Projets de situation, de vie familiale, de voyages , de sport...
En tous se découvre un désir qui donne une tension à notre temps.
- Parfois ,nous avons le sentiment de ne plus avoir de projet, parce que nous sommes pris dans les activités qui découlent des projets que nous avons mis en route antérieurement: travail , famille, vie politique ou syndicale. En fait, à ces moments, notre vie est pleine de projets en cours de réalisation.
- La retraite, parce qu'elle vide notre temps de tout ce qui l'occupait antérieurement, ouvre un immense espace vide, les projets vont pouvoir s'y ébattre. Nous allons le vivre de façons bien différentes:
- Les Temporo-angoissés sont ceux qui risquent de le vivre le plus mal. L'absence de structures, de découpage rassurant de leur temps, les met dans l'insécurité. Ils vont donc
- Ou sombrer dans la dépression
- Ou se redonner le plus vite possible le maximum d'activités qui jouent le rôle de "bouche-temps"et empêchent le sentiment dépressif.
- Les Temporo-adaptés vont sans doute subir un choc, mais ils vont tranquillement s'adapter à une situation nouvelle, et se reconstruire dans les 2 ans, une nouvelle existence convenant à leurs goût et leurs désirs. Ils vont donner libre cours aux désirs qu'ils n'avaient jamais pu réaliser.
- Les plus heureux sont les Temporo-allergiques. Finies les contraintes que 60 années de travail leur ont imposées. Ils fourmillaient déjà de projets, et ils s'en vont maintenant, hors de toute contrainte vivre leur vie, comme bon leur semble.
Mais pour tous, quelque soit notre tempérament, on peut proposer quelques pistes, à titre indicatif:

- Retenir le conseil de P.Emile VICTOR, interrogé sur son perpétuel optimisme à plus de 80 ans, et qui répondait:
"Je ne m'endors jamais le soir sans avoir préparé ma petite dose d'enthousiasme pour le lendemain."
- Avoir des projets est une sorte de condition indispensable pour que le temps nous paraisse "Vivant". On sait que notre cerveau ne peut vivre si l'électroencéphalogramme est plat. Notre temps nous semble mort si notre "electro-projectogramme" est plat. Sans projet, pas de vie.
Bien sur il convient de réfléchir sur ce qu'est un projet à 60, 70, 80 ans. Certains disent qu'on ne peut plus faire de projet lorsqu'on approche de la mort. Sans doute une fausse réponse à une vraie question. Peut-être est-on plus dépendant des autres pour la réalisation, m
ais nous sommes déjà mort si notre désir ne se fait plus entendre. Ne serait-ce que le désir de laisser de nous une image qui nous satisfasse. Cela encore est un projet: Cf. cet homme qui le matin de sa mort expliquait à son petit fils: "Tu sais, la tête, cela va encore! Cette nuit je me suis récité toute la liste des rois de France".
En réalité la capacité de faire des projets dépend de ce que nous sommes intérieurement: la vraie question à la retraite est plutôt: mais quelles sont mes curiosités, quels sont mes intérêts, quelles sont mes passions? "Donnez-moi une passion et je soulèverai le monde". Ceux-la apparaissent comme vivants qui gardent dans leur cour une curiosité, un intérêt pour la vie et le monde qui les a animés d'ailleurs durant toute leur vie, et suffisamment de personnes à aimer pour que la vie soit vivante.
3° PISTES POUR UN TEMPS "VIVANT"
UN TEMPS RESPONSABLE
Contrairement à ce que beaucoup pensent, jamais nous n'avons été aussi responsables de nous qu'aujourd'hui.
Pour beaucoup d'entre nous, notre temps s'est fait presque tout seul. Une fois posé le pied dans notre métier, une fois trouvée la personne avec qui partager sa vie, il restait peu de place pour le tout à fait nouveau. Il fallait assumer pour que se déroulent les engagements pris. Il n'y a plus rien à INVENTER.

Aujourd'hui, nous voilà tout entiers affrontés à un temps totalement libre, où rien n'est écrit, rien, ou presque rien n'est obligatoire. Il tient à nous de donner un contenu à ce temps, autrement dit un rythme et des projets.
Ceux qui tirent le meilleur parti de ce temps semblent être ceux qui acceptent d'entrer en apprentissage: tout est à apprendre, à inventer. Cela demande énergie, initiative:
Créativité: chercher à faire ce qu'on n'a jamais eu l'occasion de faire, s'ouvrir sur quelque chose de nouveau. Mais aussi développer les parts de nous-mêmes qui n'ont jamais eu la possibilité de se vivre: Cf les découvertes pour la peinture. Voire des ouvertures originales comme l'informatique à 78 ans, pour permettre le dialogue avec enfant et petits enfants informaticiens.
Apprentissage: sachant qu'il n'y a pas de limite d'âge aux apprentissages, prendre le risque de se livrer à quelque chose qui va ouvrir:
- notre corps: "je fais à 90 ans des choses que je ne faisais plus depuis que j'ai eu mes 80 ans."
- notre cour: Pas de limite d'âge aux capacités d'aimer. Par contre risque de rétrécissement, de renfermement.
- notre intelligence: universités, bien sur, mais aussi groupes de lectures de cinéma, voyages.
- notre vie relationnelle:prendre pied dans des groupes est toujours une aventure. Mais seuls ceux qui le font évitent le piège de l'isolement qui risque de se refermer: multitudes de réalisations dans les milieux ruraux.
LA REVANCHE DES "INACTIFS"
La société nous déclare "INACTIFS"
Ce mot, elle l'a inventé en 1945, mais sans doute n'oserait-elle plus l'inventer aujourd'hui, tant les 10 Millions de retraités occupent une place active dans des secteurs multiples.
Mais cette activité se situe en majeure partie dans ce q
u'on appelle les activités "Non Marchandes", c'est à dire celles qui ne font pas l'objet d'un salaire.
En additionnant les millions d'heures d'activité authentique et indispensable à la société de tous les "inactifs", un économiste a montré que le budget potentiel de cette activité non-marchande était aussi important que celui de l'économie marchande, celle qui est sanctionnée par un échange d'argent: salaire ou commerce.
Ce temps que le retraité transforme en temps utile, au moment où cette société le déclare inactif est une revanche extraordinaire. Ce sont des millions d'heures qui sont offertes gratuitement partout où il y a seulement besoin de relation, d'écoute, de conseil, d'amitié, de partage des responsabilités. Cela va des heures écoulées à jouer avec les petits enfants, à l'entraînement des adolescents dans les clubs sportifs, aux responsabilités dans les conseils municipaux, voire même aux mois passés à l'étranger pour transmettre un peu de notre savoir accumulé à des pays en voie de développement qui n'ont pas eu notre chance.
Ces millions d'heures d'activité sont un témoignage extraordinaire que ce temps de la retraite peut être un temps de créativité, et de vitalité.